Partager la publication "Chroniques livresques: Esprit d’hiver, Laura Kasischke"
Rien de mieux qu’un bon huit-clos glaçant signé Laura Kasischke par ce temps changeant. Si vous cherchez un roman à lire sous la couette avec un bon chocolat chaud, de l’intrigue et de l’angoisse comme vous en lisez rarement, celui-ci n’est pas prêt de vous lâcher de si tôt. Peut-être pas le meilleur de Laura Kasischke mais certainement l’un des plus riches en frissons.
Holly et son mari Eric se réveillent très tard ce matin de Noël. La journée commence déjà bien mal pour eux au vu de toutes les tâches qui les attendent, Eric doit aller chercher ses parents à l’aéroport afin qu’ils fêtent Noël ensemble, à peine levé, il abandonne sa femme à son sort. Le repas de Noël n’est pas prêt, la table n’est pas dressée, les préparatifs pour l’arrivée des invités et de la famille de son mari ne sont pas achevés et comme si ce n’était pas déjà assez stressant, Holly est hantée par une phrase qui lui trotte dans la tête depuis son réveil, et qui lui rappelle de terribles souvenirs. Des souvenirs qu’elle croyait enterrés à jamais : « Quelque chose les avait suivi depuis la Russie jusque chez eux ». La Russie, Holly et son mari s’y étaient rendu il y a de cela 13 ans, plus précisément à l’orphelinat Pokrovka n°2 en Sibérie, afin d’en ramener Tatiana, leur fille adoptive. Tatiana, aujourd’hui adolescente de 15 ans, semble très remontée contre sa mère en ce jour de Noël et ne cesse de la punir pour s’être levée si tard. Quoique ça puisse sembler ridicule, l’intrigue prend tout son sens à la toute fin du livre. En effet pour Tatty ce n’est pas un Noël comme les autres, c’est un jour important, et elle compte bien faire regretter à sa mère d’avoir dormi si tard la veille.
ANGOISSANT ! Voilà comment nous décririons ce roman. Esprit d’hiver vous inspirera peut-être une ambiance hivernale chaleureuse, des cookies, du pain d’épices, de longues après-midi en famille devant la télé ou encore des soirées cocooning devant la cheminée… mais, il n’en est rien ! Une présence mystérieuse se fait ressentir au fil des pages. L’angoisse est palpable, l’intrigue est maintenue, aucun indice sur le dénouement final n’est semé. Le sujet abordé est le déni dans toute sa puissance ravageuse. L’histoire se passe en une seule journée, en alternance entre les souvenirs de Holly et le présent jour de Noël qu’elle et sa fille passeront seules finalement à cause du blizzard qui a ravagé l’extérieur et qui par conséquent bloquera les invités de Holly chez eux et son mari dehors avec ses parents. Seule à seule, la maman et sa fille s’affronteront dans un mélange de crudité macabre et de tranquillité somnolente limite ennuyeuse. En effet, beaucoup de détails seront clairsemés tout au long de l’histoire, le moindre détail ramènera Holly à des souvenirs sans grands intérêts à première vue mais qui ont toute leur importance. Les répétitions semblent être là pour nous ennuyer mais en fait, sont placées pour nous angoisser davantage. On revient beaucoup sur le passé des deux femmes qu’on connait pourtant par cœur et qu’on nous remet au bout de 2, 3 pages. Le final est cependant subjuguant, le genre de dénouement qui vous donne envie de relire tout le livre pour n’en louper aucun détail et être certain d’en comprendre tout le sens. Une fin que nous découvrons avec un mélange effrayant de surprise et d’horreur, qui nous laisse sans voix et nous pousse à remettre en question toutes l’histoire !
Une lecture à ne pas mettre entre toutes les mains finalement, mais qui conviendra aux amateurs des sensations dérangeantes et des fins intrigantes et ouvertes…
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